Ils font partie du paysage gustatif français depuis plus d’un siècle : les camemberts dans leur petite boîte ronde en bois. Et pourtant, ce symbole bien connu de la Normandie pourrait bientôt disparaître. Voici pourquoi l’avenir de ces emballages iconiques est aujourd’hui en suspens.
Une usine centenaire sur le point de fermer
L’histoire commence à Saint-Pierre-en-Auge, dans le Calvados. C’est là que l’on trouve l’usine Cibem, fondée en 1885. Depuis des générations, elle fabrique les célèbres boîtes en bois du camembert de Normandie. Ces emballages simples mais reconnaissables entre mille sont indissociables de ce fromage si typique.
Mais d’ici 2026, cette tradition pourrait bien s’éteindre. L’entreprise est en grande difficulté économique. Placée en liquidation judiciaire, elle avait été reprise par la SNEC, une filiale du groupe Lactalis. Malheureusement, cela n’a pas suffi pour la sauver.
La direction a reconnu une « situation déficitaire persistante » dans un communiqué. Résultat : la fermeture semble inévitable. Une décision qualifiée de « particulièrement difficile ».
Un choc pour la région et ses habitants
À Saint-Pierre-en-Auge, l’annonce a été ressentie comme un coup dur. Pour beaucoup, c’est plus qu’une fermeture d’usine. C’est une part de leur identité qui s’efface. Le maire, Jacky Marie, lui-même ancien employé de la Cibem, n’a pas caché son émotion. « C’est toute l’âme de la commune qui s’en va », a confié une habitante.
Ce sont 104 salariés qui sont concernés. Certains y travaillent depuis des décennies. Une employée, forte de 55 ans d’ancienneté, a exprimé son désarroi au journal Le Parisien. Syndicats et ouvriers dénoncent une annonce brutale, inattendue. “On ne s’attendait pas à ça”, regrette Valérie Prévost, déléguée CFDT.
Et demain, quel emballage pour le camembert ?
Plus qu’un outil de conservation, la boîte en bois fait partie intégrante de l’image du camembert traditionnel. Elle incarne ce lien si fort entre gastronomie et patrimoine. Mais avec la disparition de l’unique fabricant dédié, une question se pose : qui les produira à l’avenir ?
Plusieurs scénarios sont possibles :
- Délocalisation de la production dans une autre région ou à l’étranger, au risque de perdre l’authenticité du produit
- Changement d’emballage, ce qui bouleverserait l’aspect visuel et la conservation d’un fromage emblématique
- Recherche de nouveaux producteurs locaux, capables de perpétuer ce savoir-faire
Mais rien n’est encore décidé. Et le flou demeure.
Un soutien partiel des autorités
Face à l’ampleur du choc, le groupe Lactalis a promis de ne pas abandonner les salariés. Chaque employé devrait se voir proposer un CDI dans le Calvados, a affirmé le député Jérémie Patrier-Leitus. Une mesure qui vise à rassurer. Mais ce geste suffira-t-il ?
Le savoir-faire, lui, ne se transfère pas aussi facilement. Et même si les emplois sont préservés, la région perd une pièce maîtresse de son patrimoine artisanal. Une culture façonnée génération après génération.
Un symbole menacé : que peut-on faire ?
La disparition potentielle de la boîte en bois du camembert soulève une vraie question : comment défendre les traditions locales dans un monde industriel ? Entre rentabilité économique et préservation des savoir-faire, l’équilibre semble de plus en plus fragile.
Plusieurs voix s’élèvent pour appeler à une prise de conscience. Des initiatives locales pourraient émerger. Pourquoi ne pas imaginer un soutien public, une labellisation ou des aides ciblées pour sauver cette filière ? Le patrimoine culinaire français mérite qu’on le protège.
Le camembert continuera sans doute d’exister. Mais avec quel visage ? Et à quel prix pour la mémoire de nos terroirs ? Il reste deux ans pour trouver des solutions. Le compte à rebours est lancé.




